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mercredi 20 juillet 2016

Back To Movie 1 : Mr. Holmes


     Parmi les adaptations récentes du Sherlock Holmes de Conan Doyle, la série Sherlock est selon moi celle qui traduit le mieux le caractère antipathique et scientifique du célèbre détective tout en le transposant à notre époque alors que les films de Guy Ritchie, dont les péripéties se déroulent à la fin du XIXème siècle, transforment un Holmes calculateur en un héros infatigable de film d'action. Mais le film de 2015 nous montre un tout autre Sherlock Holmes, apparut sous la plume de Mitch Cullin en 2005. Âgé de 93 ans, l'ancien détective s'est exilé depuis une trentaine d'année dans le Sussex suite à une enquête qu'il a échoué à résoudre. Il élève des abeilles et lutte contre la sénilité et la perte de mémoire pour réécrire cette dernière affaire que Watson avait déformé dans un compte rendu romancé.

« I have been alone. All my life. But with the compensations of the intellect. »

     Déchu, ce Sherlock Holmes a perdu de sa superbe et l'on frissonne à l'idée qu'il rende son dernier souffle. Il n'est définitivement plus le boxeur, violoncelliste et détective aux capacités exceptionnelles d'observation et de déduction mais cette retraite exhume la sensibilité humaine de Holmes en lui conférant la sagesse d'un Gandalf, une sagesse admirablement incarnée par Ian McKellen. Mr Holmes se prend ainsi d'affection pour Roger, le jeune fils de la gouvernante, et crée un lien presque paternel avec l'enfant en l'instruisant aux abeilles et à l'observation analytique du monde, et, réciproquement, Roger lui apporte un soutien dans son travail de remémoration. Grâce à lui, l'ancien détective parvient à compléter ses souvenirs et peut finir sa vie sereinement.

Umezaki trouve du frêne épineux dans les cendres de Hiroshima.
     Le film nous dépeint la fin d'une vie, celle d'un homme qui l'a entièrement passée seul à chercher la stimulation intellectuelle dans des enquêtes judiciaires. La mort apparaît comme quelque chose qu'il faut accepter mais surtout comme un prolongement de la vie, surtout à travers les ruines noircies de Hiroshima au lendemain de la bombe nucléaire au cœur desquelles Holmes va cueillir du frêne épineux pour entretenir sa mémoire déficiente. D'ailleurs, une fois l'écriture de sa dernière affaire achevées et l'assurance que le jeune Roger reprenne l'élevage des abeilles, le flambeau du vieux Holmes, ce dernier se recueille en disposant autour de lui des petites pierres qui, selon une tradition japonaise, représentent les morts, preuve que Sherlock Holmes a définitivement laissé son esprit rationnel et scientifique au placard.

Holmes confie les abeilles à Roger.
     Au final, le film nous propose une vision diamétralement inversé du détective inventé par Conan Doyle, l'antipathique et calculateur Sherlock Holmes est devenu un vieillard bienveillant et gâteux qui tente désespérément de s'accrocher à son ancienne activité de détective. Je peux donc comprendre que beaucoup aient pu être déçus par cette vision quelque peu romantique d'un détective célébré pour sa rationalité. Les qualités du film se sont pas à chercher du côté du personnage principal mais plutôt dans la manière avec laquelle il aborde la fin de la vie, la déliquescence du corps et de l'esprit et la possible perpétuation de l'âme. Malgré la maladresse apparente de l'illustration que constitue Holmes de cette thématique, la représentation de la vieillesse est par contraste plus touchante et émotionnelle. Ce n'est pas un film sur Sherlock Holmes, c'est un film sur la sénescence et sur la transmission d'une génération à l'autre.

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